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Le jeune faune
J'ai publié ici un conte musical nommé : " Le jeune faune"
en mp3
http://www.dogmazic.net/m3u/dwncounttitre.php?id=12792&ur=1&usr=9184
en ogg
http://www.dogmazic.net/m3u/dwncounttitre.php?id=12792&ur=2&usr=9184
Puis, si des fois, certains souhaitaient le lire en l'écoutant (ou le lire tout court ...)
Enfin voilà ... ci-joint ...
PeLF
Le jeune faune, premier chant
Il s'assit, là près du chemin qui mène au ruisseau.
Le printemps, la douceur de l'air, la vie qui se réveille sous les dernières plaques de neige grise et ruisselante, ne l'enchante plus comme avant.
Ses pairs lui ont bien expliqué qu'il était temps pour lui d'aller jouer avec les naïades, les ondines et autres nymphes de ruisseau.
Leurs frôlements, leurs oeillades et invitations à aller se rouler dans la mousse ne l'attire pas.
De fait, il se trouve un peu seul.
Beaucoup de ses camarades de son âge, chassent la demoiselle aux abords des villages humains.
Lui, ne comprend pas ces jeux.
Pourtant, la vie tourne en lui ; sa musique existe, mais il ne sais à qui la jouer, alors il joue son air pour lui.
Cela fait quelques temps déjà qu'il en a pris l'habitude ; il en a même acquis une certaine expertise.
Petit, à peine savait il parlé, il a découvert que sa flûte était un instrument de plaisir ; que les son qu'il en tirait était, au début agréable, un peu plus tard envoûtant, et maintenant déroutant, se finissent dans roulement silencieux de trilles qui sort des tripes.
L'année dernière, il a bien essayé de partager son expérience de la musique avec quelques copains, mais, c'est pas facile de parler de ceci à d'apprentis joueur de piston, qui s'exercent en utilisant comme partition, les gravures et sculptures dénudées, laissées par les aînés sur les racines des grands arbres.
« T'es pas comme nous ! »
« Enlève ta main de mon épaule, veux tu ? »
Même ses phrases il ne les a qu'imaginées, il n'a jamais osé parler, et encore moins toucher l'un des siens.
La senteur musquée d'une bauge de sanglier, le parfum de la sève verte des frênes, la chaleur du rayon de soleil, au travers des feuilles qui lui réchauffe les jambes, le vent, encore frais qui fait glisser ses cheveux le long de sa joue, l'invitent à jouer sa musique, mais, ...
Des bruits, des voix, il se cache derrière le buisson le plus proche ; deux gamins arrivent au ruisseau.
Un éclat de soleil, se reflète sur la chevelure du petit bond, un éclair de rire sort le bouche du petit brun lorsque celui-ci dérape sur une pierre, que son pied tombe à l'eau.
Le jeune faune s'approche d'eux, cueille un brun d'ajonc et le met en bouche.
Le faune : « Bonjours ! »
Le petit brun : « Qui tu es toi ? »
Le faune : « Et toi ? »
Le petit blond : « Maman, elle arrête pas de dire à ma soeur de se méfier des êtres sylvestre ! »
Le faune : « Et pourquoi ? »
Le petit blond : « Je ne sais pas. »
Le petit brun : « Moi je sais : les satyres, vous ne pensez qu'au plaisir et non à ses conséquences, c'est que qu'il dit, mon papa »
Le faune : « Si vous le voulez, revenez demain et je vous expliquerais les premières notes de ma musique »
Et, il s'en va, certain que son invitation a porté ses fruits.
Le jour suivant.
Le petit garçon brun arrive en mi matinée, nullement surpris de voir le jeune faune allongé sur la berge, jouant doucement avec ses pieds dans l'eau, mâchonnant un bout de roseau.
Le garçon : « Salut ! »
Le faune : « Salut ! T'es venu seul ? »
Le garçon s'assoit près de lui : « Mon copain il a pas voulu venir, je crois qu'il a peur de toi. »
Le faune : « Et toi, as tu peur ? »
Le garçon : « Non. Hier tu as parlé de musique, j'aime bien la musique. Tu m'apprendras ? »
Le faune : « Oui. Ton nom ? »
Le garçon : « Martin, et toi ? »
Le faune : « Sylvain. »
Et ils restent là, quelques instants immobiles, chacun dans ses pensées.
Le jeune faune commence à comprendre son rôle dans l'existence : éducateur, initiateur.
Le jeune garçon, s'interroge : « Effectivement, je n'ai pas peur de cet être, et pourtant, au village, il semblerait que soit un lieu commun d'en avoir peur. Est-ce son odeur de terre mouillée après la pluie, l'apparente douceur de la toison qui recouvre son poitrail, le son mélodique de ses phrases courtes, qui font battre mon coeur un peu plus fort ? Lorsque je ferme les yeux, je l'entends. »
Le faune :
«
Tu es rythme, tu es tambour en ton sein.
Garde les yeux fermés, Martin.
Écoute ton corps.
La musique, ce n'est pas que des sons.
C'est d'abord une sensation,
En ton fort.
Ne reste pas assis en tailleur, courbé.
Allonge toi, douce est l'herbe et
Bon support.
»
Et, baissant la voix jusqu'à chuchoter, faune poursuis :
«
Et maintenant dans ta main,
Imagine l'instrument.
Que choisiras tu, Martin,
Guitare ou flûte de pan ?
Ne choisis rien hâtivement,
Écoute le vent dans les feuilles.
Ne choisis rien maintenant,
Écoute : l'eau rigole.
Sur ta joue une herbe folle,
Pourrait te déconcentrer,
Le frisson lorsqu'elle frôle
Ta peau, un son oublié.
Ce frisson, Martin, je le connais.
Ce frisson, Martin, imagine le
Démultiplier à jamais
Comme une note, atonale
»
Se taisant, il continue à parcourir, la joue, le front, le cou du garçon avec son roseau.
Sur la peau des bras du petit, la chair de poule ondule comme une vague infiniment renouvelée.
Puis il se lève, parcoure quelques pas sans bruits et chuchote avant de se fondre dans les bois :
« A demain, Martin. »
Le jeune faune, seconde vague
Au matin du troisième jour
Près du ruisseau, à l'orée de la foret, Martin revient, le faune aussi.
Ils ne disent rien, s'approchent l'un de l'autre, se fixant du regard.
Le temps est resplendissant, cela fait trois jours que le soleil du printemps chauffe cette contrée.
Les dernières plaques de neiges ont disparues, les fleurs blanches, bien éclosent, se voient concurrencées par les jaunes, qui percent sous les feuilles.
Sur un signe de Sylvain, ils s'assoient au pied d'un arbre à quelque distance de l'eau.
Matin : « Je .... »
Le faune : « Oui ? »
Martin : « Bien c'est difficile à expliquer, ... »
Le faune : « Prends ton temps. »
Martin : « J'ai beaucoup pensé à ce que tu m'as dit, hier. J'ai même eu du mal en m'endormir. »
Le faune : « Et ? »
Martin :
«
Voilà, lorsque j'ai ouvert les yeux, hier, tu était parti.
Et je me sentais bien !
Tout autour de moi, m'amusait.
J'ai entendu la musique des mouches qui volent,
J'ai ressenti la couleur des ailes d'un papillon,
J'ai goûter à l'odeur d'une pomme de pin verte tombée au sol,
Tout me semblait note et son.
Et, dans la nuit de ma chambre, j'ai eu peur.
Peur de ne plus ressentir cette impression,
Peur de ne pas te revoir.
»
Le faune :
«
Nous avons commencer à tisser un lien,
J'entends ici qu'il pourra être puissant.
Je te le demande officiellement,
Veux tu être mon élève, Martin ?
Toute musique avant de s'exprimer,
Est d'abord intérieure.
Penser autrement, serait leurre.
Je t'aiderais à la trouver.
Il me faudra ta confiance,
Mieux qu'une permission.
Il te faudra sans méfiance,
Apprendre tes émotions.
J'aimerais tant te guider,
Au long de ces années.
Celles de ton enfance,
Celles de ta tolérance.
Tu seras pour ce temps,
Mon instrument.
Réfléchi, ne dis rien,
Veux tu être mon élève, Martin ?
»
Quelques mois plus tard, un soir de fin d'été
Le soleil est juste couché, le ciel est rose vif, vénus brille déjà à coté d'un croissant de lune pâle.
Sylvain est assis, Martin, à coté, la tête sur son épaule.
Le faune :
«
Vois tu Martin.
Tu as acquis ta première note en écoutant ton souffle sous mes doigts caressant ton bras.
La deuxième, lorsque ma main a frôlé ton cou.
Les suivantes, pour chaque vertèbres.
Tu as perçus des rythmes lorsque nous courrions, main dans la main, sur les rochers d'un versant, après un faon.
Tes premières mélodies sont sorties en ressentant mon souffle dans ton dos.
Les odeurs des fraises et framboises sauvages que nous cueillons l'un pour l'autre ont données des couleurs à ta musique.
Une harmonie certaine, se dégage, lorsque tu souffles dans ces bouts de roseau.
Des émotions joyeuses transparaissent.
Tu attireras sans contexte majorité de tes semblables.
Sans aucun doute, tu les feras danser.
»
Il poursuit :
«
Je te propose, Martin,
Maintenant d'aller plus loin.
D'apprendre ce désir,
Précurseur de plaisir.
Aujourd'hui trop heureux,
Pour comprendre.
Soit demain valeureux,
Pour apprendre.
Dans quelques moments,
Nous irons.
A l'aube, jour naissant,
Découvrons .
Les cerfs fiers et grands,
Gémirons.
Des ces sons ! Maintenant,
Dormons.
»
Et Martin se nichant dans les bras de son professeur :
«
Bonne nuit, prince des bois,
Les nuits n'étant plus très chaudes,
En me chantant une ode,
Veille à ce que je n'ai froid.
»
Puis il éclate de son rire d'enfant :
«
Je ne sais pas si tu est une bonne fréquentation !
Si je reviens à la maison en parlant comme ça, comme toi,
mes parents ne me reconnaîtrons pas.
Que me feras tu voir exactement demain ?
»
Le faune : « Le brame des cerfs. »
...
Le brame, à l'aube
Martin et le Sylvain, sont à quelques mètres d'un grand mâle, de onze ou douze cors. La tête tendu vers le ciel, un filet de bave à sa gueule, l'animal s'exprime de toute la force de ses poumons.
Le faune : « Entends tu, Martin ? »
Martin : « Oui, ... Je sens les vibrassions de son râle, à même le sol, dans mes jambes. »
Le faune : « Et que penses tu de cet animal ? De ce son ? »
Martin : « On dirait qu'il a mal, qu'il souffre. Mais son regard n'est pas un regard de douleur, c'est un regard de fou ! »
Le faune, ferme les yeux, inspire et expire quelques bouffée d'air profondes, tend une main juste au dessus de la nuque de son élève et psalmodie :
«
Vas, Martin,
Par les pouvoirs qui sont les miens,
Ton corps, quittes.
Vas, petit
Que la foret t'y aide, apprenti,
Vole vers lui.
Que ton esprit habite cette bête !
Que son désir emplisse ta tête !
Vas, Martin,
Je te retiens.
»
Le garçon s'écroule dans les bras du satyre, qui s'assoie et le berce.
Quelques minutes plus tard, le garçons ouvre les yeux.
Il se mets à pleurer, jusqu'à hoqueter.
Le faune continue de le bercer.
Martin se calme petit à petit, il s'endort même un peu.
Il se réveille, calme et sérieux :
«
J'ai vu des images hors de mon âge,
J'ai entendu des sons qui parlent de passion,
Je commence à te comprendre lorsque tu évoques le désir,
C'est de la souffrance pleine de promesses,
C'est une douleur qui promet un avenir ....
»
Le faune :
«
C'est bien Martin, tu as parfaitement compris.
Il nous faut une pause, une respiration.
Un silence musical, si tu veux.
Je vais m'en aller, quelques jours, semaines, ou années.
Je te laisse méditer et travailler ta musique seul quelques temps.
»
Il rejoint l'endroit où se tenait le cerf, il y a un moment.
Le soleil, juste levé, l'illumine, et, il disparaît à la vue du garçon.
Martin hurle : « NOOOOOOOOON ! »
Dans les sous bois le faune pense pour lui :
«
Ah, Martin,
As tu idée du désir qu'est le mien ?
A coté, celui de l'animal, n'est rien.
Vas, Martin,
Je ne pourrais pas te laisser trop longtemps.
»
Le jeune faune, troisième et dernier volet
Plusieurs mois sont passés, depuis la séparation. Nous sommes en plein coeur de l'hiver, une couche de neige recouvre la totalité de la plaine et de la foret. Un froid sec s'est instauré, et une bande de gamin joue à glisser sur le ruisseau gelé et à se lancer des boules de neige.
C'est à se moment que Sylvain sort du bois, les regarde, s'avance vers eux. Les gamins reculent, sauf un, dont ont devine les mèches blondes sous son bonnet.
Le gamin : « C'est pas ta saison ! Que fais tu là, l'homme des bois ? »
Le faune : « Bonjour, jeune homme. Peut être te souviens tu de moi. Tu es l'un des ami de Martin je crois. »
Le gamin : « Euh, bonjour, oui, Martin est mon ami. Mais depuis plusieurs mois, il ne joue plus avec moi. Il erre avec sa flûte, il ne nous fait plus danser, sa musique est trop triste. »
Le faune : « Serais tu où je peux le trouver ? »
Le gamin : « Oui, il va souvent vers la grotte aux fées, à la source du ruisseau. Mais va t'en maintenant, tu fais peur à mes copains. Laisse nous jouer. »
Le faune s'éloigne, remontant le cour du ru gelé, et les rires et cris des gamins, ne mettent pas bien longtemps, à reprendre comme avant.
Il avance, et entend, d'abord comme une plainte, quelques pas de plus, c'est un chant, un pleur cependant, il met un temps à reconnaître qu'il s'agit d'une flûte, lui ! Et Pourtant.
Il pense :
«
L'élève a dépassé, le maître ! En réfléchissant, cela n'est pas étonnant.
Et tant que satyre, si j'éprouve du désir,
je suis plutôt assentimental,
si je vis et jouis des émotions, les miennes et celles des autres,
je ne connais que peu le sens des mots humanité, amitié et amour.
»
Et il avance encore, vers la source des sons. Aucun doute pour lui, il s'agit bien de la musique de Martin.
Il se dit :
«
Oh, Martin, je pensais te faire mourir de désir, à mon égard,
Et, au lieu d'une musique frémissant l'impatience,
J'entends une douleur insondable.
Oh, ...
»
Les notes se sont arrêtées, ses pensées aussi. Martin est à deux pas de lui, assis sur une roche gelée.
Un très long silence, s'en suit, pas le moindre bruit. La petite bise n'est plus, pas le moindre bruissement. Tout est figé. Même leurs yeux rivés à ceux de l'autre.
Le faune rompt la pause : « J'entends que tu souffres. »
Martin : « Oui. »
Le faune : « Veux-tu me dire pourquoi ? »
Martin ferme les yeux, secoue la tête.
S'il n'était pas du tout préparé à la rupture, il a eu le temps d'imaginer ces retrouvailles.
Il a perçu l'envie du faune.
Il sait pourquoi celui-ci lui à fait comprendre ce qu'est un désir bestial.
Lui même, malgré son jeune âge, s'est surpris à avoir une douloureuse tension dans l'entre jambe, à la seule évocation de sa dernière leçon de musique.
Seulement, ses phantasmes libérateurs, le portent plus vers les jeunes filles du village que vers son (ex ?) professeurs de musique et de vie.
Martin, en ouvrant les yeux :
«
Sylvain, à moi de chanter maintenant,
Tu m'as appris bien plus que les notes,
Une musique autre, bien plus haute,
Tu m'as appris à être vivant.
J'ai aimé tes caresses,
Comme des caresses,
J'ai aimé être dans tes bras,
Lorsque j'avais froid,
Je me suis enivré de ton odeur,
Sauvage.
Je me suis régalé d'un bonheur,
Bien sage,
Du moins le croyais-je.
Je ne savais pas.
Comme un enfant se doit,
Que pour toi, désir est loi.
Si mes sons pleurent ici,
C'est d'avoir compris,
Que tu ne m'a point quitté,
J'attendais de te dire : je vais m'en aller.
Pas de suite, cependant,
Je dois reconnaître que tu ne m'as rien caché,
De ta nature, de tes penchants.
J'ai pour toi un marché.
J'aimerais te l'expliquer,
Là, dans la grotte aux fées,
Où, seule une dernière fois,
Tu me serreras dans tes bras.
»
Dans la grotte, quelques brindilles flambent.
Devant ce feu, le jeune faune tient Martin dans ses bras, sur ses genoux.
Martin, se laissant bercer, lui parle de l'avenir :
«
Je pense devenir professeur, de musique peut-être, de théâtre, je ne sais pas encore, mais d'arts certainement.
C'est toi qui m'a donner ce goût.
J'aurais pleins d'élèves, des petits et plus grands.
Mes leçons seront probablement plus classique que les tiennes.
Et lorsque des garçons, plus sensibles que les autres se présenteront, je te les enverrais.
Tu leur enseigneras, comme tu l'a fais avec moi, les émotions.
Grâce à toi, même si je t'en sens toi même peu capable, ils connaîtrons un arc en ciel de sentiments.
Promets moi juste ceci :
Tu ne forceras aucune chose, ta seule séduction sera la vérité.
Il se pourra que parmi ceux là, l'un soit plus attiré par toi que moi.
»
Ils restent un peu comme ça, le faune ne dit rien, il n'y a rien à dire.
Ils se quittent, un dernier regard tient lieu d'adieu.
Martin retourne à son village, moins triste, maintenant qu'il a dit, ce qu'il avait à dire.
Le faune retourne à sa foret, avec juste assez d'espoir pour calmer son désir, qui l'aurait sinon depuis longtemps consumés.
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Puis, si des fois, certains souhaitaient le lire en l'écoutant (ou le lire tout court ...)
Enfin voilà ... ci-joint ...
PeLF
Le jeune faune, premier chant
Il s'assit, là près du chemin qui mène au ruisseau.
Le printemps, la douceur de l'air, la vie qui se réveille sous les dernières plaques de neige grise et ruisselante, ne l'enchante plus comme avant.
Ses pairs lui ont bien expliqué qu'il était temps pour lui d'aller jouer avec les naïades, les ondines et autres nymphes de ruisseau.
Leurs frôlements, leurs oeillades et invitations à aller se rouler dans la mousse ne l'attire pas.
De fait, il se trouve un peu seul.
Beaucoup de ses camarades de son âge, chassent la demoiselle aux abords des villages humains.
Lui, ne comprend pas ces jeux.
Pourtant, la vie tourne en lui ; sa musique existe, mais il ne sais à qui la jouer, alors il joue son air pour lui.
Cela fait quelques temps déjà qu'il en a pris l'habitude ; il en a même acquis une certaine expertise.
Petit, à peine savait il parlé, il a découvert que sa flûte était un instrument de plaisir ; que les son qu'il en tirait était, au début agréable, un peu plus tard envoûtant, et maintenant déroutant, se finissent dans roulement silencieux de trilles qui sort des tripes.
L'année dernière, il a bien essayé de partager son expérience de la musique avec quelques copains, mais, c'est pas facile de parler de ceci à d'apprentis joueur de piston, qui s'exercent en utilisant comme partition, les gravures et sculptures dénudées, laissées par les aînés sur les racines des grands arbres.
« T'es pas comme nous ! »
« Enlève ta main de mon épaule, veux tu ? »
Même ses phrases il ne les a qu'imaginées, il n'a jamais osé parler, et encore moins toucher l'un des siens.
La senteur musquée d'une bauge de sanglier, le parfum de la sève verte des frênes, la chaleur du rayon de soleil, au travers des feuilles qui lui réchauffe les jambes, le vent, encore frais qui fait glisser ses cheveux le long de sa joue, l'invitent à jouer sa musique, mais, ...
Des bruits, des voix, il se cache derrière le buisson le plus proche ; deux gamins arrivent au ruisseau.
Un éclat de soleil, se reflète sur la chevelure du petit bond, un éclair de rire sort le bouche du petit brun lorsque celui-ci dérape sur une pierre, que son pied tombe à l'eau.
Le jeune faune s'approche d'eux, cueille un brun d'ajonc et le met en bouche.
Le faune : « Bonjours ! »
Le petit brun : « Qui tu es toi ? »
Le faune : « Et toi ? »
Le petit blond : « Maman, elle arrête pas de dire à ma soeur de se méfier des êtres sylvestre ! »
Le faune : « Et pourquoi ? »
Le petit blond : « Je ne sais pas. »
Le petit brun : « Moi je sais : les satyres, vous ne pensez qu'au plaisir et non à ses conséquences, c'est que qu'il dit, mon papa »
Le faune : « Si vous le voulez, revenez demain et je vous expliquerais les premières notes de ma musique »
Et, il s'en va, certain que son invitation a porté ses fruits.
Le jour suivant.
Le petit garçon brun arrive en mi matinée, nullement surpris de voir le jeune faune allongé sur la berge, jouant doucement avec ses pieds dans l'eau, mâchonnant un bout de roseau.
Le garçon : « Salut ! »
Le faune : « Salut ! T'es venu seul ? »
Le garçon s'assoit près de lui : « Mon copain il a pas voulu venir, je crois qu'il a peur de toi. »
Le faune : « Et toi, as tu peur ? »
Le garçon : « Non. Hier tu as parlé de musique, j'aime bien la musique. Tu m'apprendras ? »
Le faune : « Oui. Ton nom ? »
Le garçon : « Martin, et toi ? »
Le faune : « Sylvain. »
Et ils restent là, quelques instants immobiles, chacun dans ses pensées.
Le jeune faune commence à comprendre son rôle dans l'existence : éducateur, initiateur.
Le jeune garçon, s'interroge : « Effectivement, je n'ai pas peur de cet être, et pourtant, au village, il semblerait que soit un lieu commun d'en avoir peur. Est-ce son odeur de terre mouillée après la pluie, l'apparente douceur de la toison qui recouvre son poitrail, le son mélodique de ses phrases courtes, qui font battre mon coeur un peu plus fort ? Lorsque je ferme les yeux, je l'entends. »
Le faune :
«
Tu es rythme, tu es tambour en ton sein.
Garde les yeux fermés, Martin.
Écoute ton corps.
La musique, ce n'est pas que des sons.
C'est d'abord une sensation,
En ton fort.
Ne reste pas assis en tailleur, courbé.
Allonge toi, douce est l'herbe et
Bon support.
»
Et, baissant la voix jusqu'à chuchoter, faune poursuis :
«
Et maintenant dans ta main,
Imagine l'instrument.
Que choisiras tu, Martin,
Guitare ou flûte de pan ?
Ne choisis rien hâtivement,
Écoute le vent dans les feuilles.
Ne choisis rien maintenant,
Écoute : l'eau rigole.
Sur ta joue une herbe folle,
Pourrait te déconcentrer,
Le frisson lorsqu'elle frôle
Ta peau, un son oublié.
Ce frisson, Martin, je le connais.
Ce frisson, Martin, imagine le
Démultiplier à jamais
Comme une note, atonale
»
Se taisant, il continue à parcourir, la joue, le front, le cou du garçon avec son roseau.
Sur la peau des bras du petit, la chair de poule ondule comme une vague infiniment renouvelée.
Puis il se lève, parcoure quelques pas sans bruits et chuchote avant de se fondre dans les bois :
« A demain, Martin. »
Le jeune faune, seconde vague
Au matin du troisième jour
Près du ruisseau, à l'orée de la foret, Martin revient, le faune aussi.
Ils ne disent rien, s'approchent l'un de l'autre, se fixant du regard.
Le temps est resplendissant, cela fait trois jours que le soleil du printemps chauffe cette contrée.
Les dernières plaques de neiges ont disparues, les fleurs blanches, bien éclosent, se voient concurrencées par les jaunes, qui percent sous les feuilles.
Sur un signe de Sylvain, ils s'assoient au pied d'un arbre à quelque distance de l'eau.
Matin : « Je .... »
Le faune : « Oui ? »
Martin : « Bien c'est difficile à expliquer, ... »
Le faune : « Prends ton temps. »
Martin : « J'ai beaucoup pensé à ce que tu m'as dit, hier. J'ai même eu du mal en m'endormir. »
Le faune : « Et ? »
Martin :
«
Voilà, lorsque j'ai ouvert les yeux, hier, tu était parti.
Et je me sentais bien !
Tout autour de moi, m'amusait.
J'ai entendu la musique des mouches qui volent,
J'ai ressenti la couleur des ailes d'un papillon,
J'ai goûter à l'odeur d'une pomme de pin verte tombée au sol,
Tout me semblait note et son.
Et, dans la nuit de ma chambre, j'ai eu peur.
Peur de ne plus ressentir cette impression,
Peur de ne pas te revoir.
»
Le faune :
«
Nous avons commencer à tisser un lien,
J'entends ici qu'il pourra être puissant.
Je te le demande officiellement,
Veux tu être mon élève, Martin ?
Toute musique avant de s'exprimer,
Est d'abord intérieure.
Penser autrement, serait leurre.
Je t'aiderais à la trouver.
Il me faudra ta confiance,
Mieux qu'une permission.
Il te faudra sans méfiance,
Apprendre tes émotions.
J'aimerais tant te guider,
Au long de ces années.
Celles de ton enfance,
Celles de ta tolérance.
Tu seras pour ce temps,
Mon instrument.
Réfléchi, ne dis rien,
Veux tu être mon élève, Martin ?
»
Quelques mois plus tard, un soir de fin d'été
Le soleil est juste couché, le ciel est rose vif, vénus brille déjà à coté d'un croissant de lune pâle.
Sylvain est assis, Martin, à coté, la tête sur son épaule.
Le faune :
«
Vois tu Martin.
Tu as acquis ta première note en écoutant ton souffle sous mes doigts caressant ton bras.
La deuxième, lorsque ma main a frôlé ton cou.
Les suivantes, pour chaque vertèbres.
Tu as perçus des rythmes lorsque nous courrions, main dans la main, sur les rochers d'un versant, après un faon.
Tes premières mélodies sont sorties en ressentant mon souffle dans ton dos.
Les odeurs des fraises et framboises sauvages que nous cueillons l'un pour l'autre ont données des couleurs à ta musique.
Une harmonie certaine, se dégage, lorsque tu souffles dans ces bouts de roseau.
Des émotions joyeuses transparaissent.
Tu attireras sans contexte majorité de tes semblables.
Sans aucun doute, tu les feras danser.
»
Il poursuit :
«
Je te propose, Martin,
Maintenant d'aller plus loin.
D'apprendre ce désir,
Précurseur de plaisir.
Aujourd'hui trop heureux,
Pour comprendre.
Soit demain valeureux,
Pour apprendre.
Dans quelques moments,
Nous irons.
A l'aube, jour naissant,
Découvrons .
Les cerfs fiers et grands,
Gémirons.
Des ces sons ! Maintenant,
Dormons.
»
Et Martin se nichant dans les bras de son professeur :
«
Bonne nuit, prince des bois,
Les nuits n'étant plus très chaudes,
En me chantant une ode,
Veille à ce que je n'ai froid.
»
Puis il éclate de son rire d'enfant :
«
Je ne sais pas si tu est une bonne fréquentation !
Si je reviens à la maison en parlant comme ça, comme toi,
mes parents ne me reconnaîtrons pas.
Que me feras tu voir exactement demain ?
»
Le faune : « Le brame des cerfs. »
...
Le brame, à l'aube
Martin et le Sylvain, sont à quelques mètres d'un grand mâle, de onze ou douze cors. La tête tendu vers le ciel, un filet de bave à sa gueule, l'animal s'exprime de toute la force de ses poumons.
Le faune : « Entends tu, Martin ? »
Martin : « Oui, ... Je sens les vibrassions de son râle, à même le sol, dans mes jambes. »
Le faune : « Et que penses tu de cet animal ? De ce son ? »
Martin : « On dirait qu'il a mal, qu'il souffre. Mais son regard n'est pas un regard de douleur, c'est un regard de fou ! »
Le faune, ferme les yeux, inspire et expire quelques bouffée d'air profondes, tend une main juste au dessus de la nuque de son élève et psalmodie :
«
Vas, Martin,
Par les pouvoirs qui sont les miens,
Ton corps, quittes.
Vas, petit
Que la foret t'y aide, apprenti,
Vole vers lui.
Que ton esprit habite cette bête !
Que son désir emplisse ta tête !
Vas, Martin,
Je te retiens.
»
Le garçon s'écroule dans les bras du satyre, qui s'assoie et le berce.
Quelques minutes plus tard, le garçons ouvre les yeux.
Il se mets à pleurer, jusqu'à hoqueter.
Le faune continue de le bercer.
Martin se calme petit à petit, il s'endort même un peu.
Il se réveille, calme et sérieux :
«
J'ai vu des images hors de mon âge,
J'ai entendu des sons qui parlent de passion,
Je commence à te comprendre lorsque tu évoques le désir,
C'est de la souffrance pleine de promesses,
C'est une douleur qui promet un avenir ....
»
Le faune :
«
C'est bien Martin, tu as parfaitement compris.
Il nous faut une pause, une respiration.
Un silence musical, si tu veux.
Je vais m'en aller, quelques jours, semaines, ou années.
Je te laisse méditer et travailler ta musique seul quelques temps.
»
Il rejoint l'endroit où se tenait le cerf, il y a un moment.
Le soleil, juste levé, l'illumine, et, il disparaît à la vue du garçon.
Martin hurle : « NOOOOOOOOON ! »
Dans les sous bois le faune pense pour lui :
«
Ah, Martin,
As tu idée du désir qu'est le mien ?
A coté, celui de l'animal, n'est rien.
Vas, Martin,
Je ne pourrais pas te laisser trop longtemps.
»
Le jeune faune, troisième et dernier volet
Plusieurs mois sont passés, depuis la séparation. Nous sommes en plein coeur de l'hiver, une couche de neige recouvre la totalité de la plaine et de la foret. Un froid sec s'est instauré, et une bande de gamin joue à glisser sur le ruisseau gelé et à se lancer des boules de neige.
C'est à se moment que Sylvain sort du bois, les regarde, s'avance vers eux. Les gamins reculent, sauf un, dont ont devine les mèches blondes sous son bonnet.
Le gamin : « C'est pas ta saison ! Que fais tu là, l'homme des bois ? »
Le faune : « Bonjour, jeune homme. Peut être te souviens tu de moi. Tu es l'un des ami de Martin je crois. »
Le gamin : « Euh, bonjour, oui, Martin est mon ami. Mais depuis plusieurs mois, il ne joue plus avec moi. Il erre avec sa flûte, il ne nous fait plus danser, sa musique est trop triste. »
Le faune : « Serais tu où je peux le trouver ? »
Le gamin : « Oui, il va souvent vers la grotte aux fées, à la source du ruisseau. Mais va t'en maintenant, tu fais peur à mes copains. Laisse nous jouer. »
Le faune s'éloigne, remontant le cour du ru gelé, et les rires et cris des gamins, ne mettent pas bien longtemps, à reprendre comme avant.
Il avance, et entend, d'abord comme une plainte, quelques pas de plus, c'est un chant, un pleur cependant, il met un temps à reconnaître qu'il s'agit d'une flûte, lui ! Et Pourtant.
Il pense :
«
L'élève a dépassé, le maître ! En réfléchissant, cela n'est pas étonnant.
Et tant que satyre, si j'éprouve du désir,
je suis plutôt assentimental,
si je vis et jouis des émotions, les miennes et celles des autres,
je ne connais que peu le sens des mots humanité, amitié et amour.
»
Et il avance encore, vers la source des sons. Aucun doute pour lui, il s'agit bien de la musique de Martin.
Il se dit :
«
Oh, Martin, je pensais te faire mourir de désir, à mon égard,
Et, au lieu d'une musique frémissant l'impatience,
J'entends une douleur insondable.
Oh, ...
»
Les notes se sont arrêtées, ses pensées aussi. Martin est à deux pas de lui, assis sur une roche gelée.
Un très long silence, s'en suit, pas le moindre bruit. La petite bise n'est plus, pas le moindre bruissement. Tout est figé. Même leurs yeux rivés à ceux de l'autre.
Le faune rompt la pause : « J'entends que tu souffres. »
Martin : « Oui. »
Le faune : « Veux-tu me dire pourquoi ? »
Martin ferme les yeux, secoue la tête.
S'il n'était pas du tout préparé à la rupture, il a eu le temps d'imaginer ces retrouvailles.
Il a perçu l'envie du faune.
Il sait pourquoi celui-ci lui à fait comprendre ce qu'est un désir bestial.
Lui même, malgré son jeune âge, s'est surpris à avoir une douloureuse tension dans l'entre jambe, à la seule évocation de sa dernière leçon de musique.
Seulement, ses phantasmes libérateurs, le portent plus vers les jeunes filles du village que vers son (ex ?) professeurs de musique et de vie.
Martin, en ouvrant les yeux :
«
Sylvain, à moi de chanter maintenant,
Tu m'as appris bien plus que les notes,
Une musique autre, bien plus haute,
Tu m'as appris à être vivant.
J'ai aimé tes caresses,
Comme des caresses,
J'ai aimé être dans tes bras,
Lorsque j'avais froid,
Je me suis enivré de ton odeur,
Sauvage.
Je me suis régalé d'un bonheur,
Bien sage,
Du moins le croyais-je.
Je ne savais pas.
Comme un enfant se doit,
Que pour toi, désir est loi.
Si mes sons pleurent ici,
C'est d'avoir compris,
Que tu ne m'a point quitté,
J'attendais de te dire : je vais m'en aller.
Pas de suite, cependant,
Je dois reconnaître que tu ne m'as rien caché,
De ta nature, de tes penchants.
J'ai pour toi un marché.
J'aimerais te l'expliquer,
Là, dans la grotte aux fées,
Où, seule une dernière fois,
Tu me serreras dans tes bras.
»
Dans la grotte, quelques brindilles flambent.
Devant ce feu, le jeune faune tient Martin dans ses bras, sur ses genoux.
Martin, se laissant bercer, lui parle de l'avenir :
«
Je pense devenir professeur, de musique peut-être, de théâtre, je ne sais pas encore, mais d'arts certainement.
C'est toi qui m'a donner ce goût.
J'aurais pleins d'élèves, des petits et plus grands.
Mes leçons seront probablement plus classique que les tiennes.
Et lorsque des garçons, plus sensibles que les autres se présenteront, je te les enverrais.
Tu leur enseigneras, comme tu l'a fais avec moi, les émotions.
Grâce à toi, même si je t'en sens toi même peu capable, ils connaîtrons un arc en ciel de sentiments.
Promets moi juste ceci :
Tu ne forceras aucune chose, ta seule séduction sera la vérité.
Il se pourra que parmi ceux là, l'un soit plus attiré par toi que moi.
»
Ils restent un peu comme ça, le faune ne dit rien, il n'y a rien à dire.
Ils se quittent, un dernier regard tient lieu d'adieu.
Martin retourne à son village, moins triste, maintenant qu'il a dit, ce qu'il avait à dire.
Le faune retourne à sa foret, avec juste assez d'espoir pour calmer son désir, qui l'aurait sinon depuis longtemps consumés.