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art et industrie

novembre -1 modifié dans Economie de la musique
Je vous transmet mon dernier billet sur les rapports entre art et industrie -de la création- un compte-rendu et une réflexion sur la conférence à laquelle j'ai pu assister.

http://aisyk.blogspot.com/2007/05/art-et-industrie.html

Réponses

  • j'ai lu ton compte rendu

    bien sûr je suis d'accord avec ta conclusion
    Je ne suis pas opposé à tous ces métiers alimentaires mais ils doivent à mon sens être considérés comme tels, et pas comme des démarches artistiques originales, car c'est tromper le public, tromper les gens sur la définition de l'art, et pervertir les missions essentielles de l'art (réflexions, réactions, opposition...).
    mais j'ai une envie de dire ça moins gentiment
    marre d'être gentil et modéré
    grrrr

    ce qui me vient en vrac :

    1° marre de ces experts de la musique qui dissertent à tout va depuis des lustres et répètent les mêmes banalités - cette manière qu'on a de vouloir à tout prix récupérer les créateurs pour les intégrer de force dans l'HISTOIRE DE L'ART (là tout le monde devrait se metttre à genoux et arborer un sourire béat d'admiration parce que , quand un truc rentre dans l'histoire de l'art hé bien c'est comme quand le pape sanctifie un guss)

    2° putain.. comment peut-on parler d'art et de création dans ces termes là ?
    faut être clair, les kékés qui font de la musique de pub de jeux vidéos ne fnt rien d'autre que les créateurs de paires de chaussettes (lesquels me semblent-ils n'ont pas droit au titre d'artiste)
    c'est pas parce qu'on fait de la zique qu'on est forcément un "artiste" bordel à schtroumpff
    ou alors
    invitions les coiffeurs, les concepteurs de chaussettes, les génies du marketing dans le vaste monde des artistes. Invitons nous nous mêmes, du moment qu'on a appuyé sur le bouton de son logiciel à faire des boucles electroniques, dans le monde merveilleux et manifestement si attrayant des artistes (après c'est les mêmes kékés qui pleurent : "comment ça se fait ? j'ai fait un super album avec mon super logiciel de samples, et je gagne pas ma vie malgré cet effort surhumain ? c'est pas juste, je vais aller disserter sur la condition des artistes à l'ère numérique alors !!)

    3° ça m'horripile
    ça m'horripile depuis toujours en fait
    je vais redevenir cynique et méchant et élitiste
    marre des povs zigs qu'on strictement rien à dire mais qui disposent de moyens d'enregistrement et de promotion qui les autorisent à entrer dans la grande porte du monde de l'art

    4° ce vide mon dieu
    ce creux
    on est vraiment dans l'ère du vide de l'hyper média mon cul
    on le voit dans les discours politiques, lesquels importent moins que de savoir si Cécilia a voté ou pas, ou si fillon a battu sarko au footing du matin
    c'est déplorable
    je zieute d'un oeil MTV au café le matin, et encore tout à l'heure à la radio une émission consacrée à la "chanson française"
    pffff
    c'est nul, abyssalement creux

    5° le pire, c'est que les français, et pas seulement eux, aiment ça en général
    se divertir et ne pas penser (pendant que les experts se masturbent en dissertant sur l'art et l'industrie, ou font des think thank sur la musique à l'ère numérique)
    je hais décidément ce monde là de plus en plus
    envie de virer tous les textes que j'ai pu écrire au sujet de la musique

    bref
    cette conférence devait être terriblement énervante à mon avis aysik :)
  • Oula...

    Je l'ai trouvée intéressante cette confrontation de deux mondes. Surtout que l'universitaire (Nicolas Thély, auquel je lui ai envoyé un lien vers mon texte) s'est posé une question à la fin de la conférence "mais pourquoi il n'y a pas eu plus de réactions au discours proposé ?". Cette dichotomie me semble vraiment essentielle pour comprendre le milieu des marketeux.

    L'industrie vue comme bouche de sortie essentielle (et par là, la publicité, les jeux vidéos...) aux artistes pour qu'ils trouvent leur public, mais aussi et surtout pour qu'ils se fassent de l'argent. La valeur de l'artiste est niée, n'est pris en compte qu'un constat de départ, l'artiste ne serait là que pour en profiter comme les autres... ("et nous au passage on lui propose des outils sur lesquels on va se faire un max de pognon"). Même logique que les myspayce et cie, profiter de la valeur de l'artiste en dénaturant complètement son oeuvre, son propos pour y imposer un message. J'allais dire, même, profiter du terme "artiste" pour imposer aux gens que le marketing et la pub sont des arts (et pourquoi pas pour profiter des dispositifs favorables aux artistes (intermittence, subventions...).)

    Surtout un exemple édifiant, celui de LCD Sound System, le gars qui a fait la pub pour les chaussures nike et apple (on écoute son nih-pod pendant son jogging), il aurait "imposé" un morceau de 45:22 aux marketeux.... :lol: On voit ici le décalage de sens, entre ce qui importe pour les marketeux (le format temps), et ce qui semble le plus important (le message, les paroles, la démarche, la critique...).
  • On voit ici le décalage de sens, entre ce qui importe pour les marketeux (le format temps), et ce qui semble le plus important (le message, les paroles, la démarche, la critique...).

    oui un décalage de temps, c'est tout à fait ça
    à développer même (faudrait de la philosophie sur ce coup, et la philosophie du temps c'est coton : moi je dirais le temps de la croissance, de la maturation contre le temps de la production, le temps qui doit durer le moins de temps possible car le temps c'est de l'argent etc.)
    tant mieux que LC sound system prenne son temps et ait le pouvoir d'imposer ce rythme là (et son rythme en général) aux abrutis du markékéting way of (non-)thinking
    l'autre solution (je parle pour des types et des gonzesses comme moi) c'est deprendre son temps en ignorant complètement le temps du marketing. ça fait un bien fou.je conseille à ceux d'entre vous qui souffre de contrats de productions foireux, hyper contraignants etc. Bon d'accord, on gagnera jamais rien, mais qu'est-ce qu'on vit mieux quand même.
  • Très cher Aisyk... En lisant le sujet de ton post, j'allais gueuler...
    J'étais près, j'avais déjà inspiré l'air qu'il me fallait pour te souffler si fort que rien qu'en te gueulant dessus, j'allais te faire remonter le Rhone à contre courant.

    Tss, c'était sans compter sur ta perspicacité habituelle ! Je cite :
    Dans les faits, on peut se poser plusieurs questions. L'artiste qui conçoit des musiques pour des publicités, des jeux vidéos, produit-il de l'art, ou n'est-ce qu'un travail alimentaire ?
    Je pense qu'on devrait vraiment commencer par nous mettre d'accord sur la différence entre un Artiste et un Artisan.

    En tout cas, pour moi, le propre de l'art c'est qu'il ne sert a rien [Warning ; ceci est une grosse connerie qui a pour propos de mettre à peu près tt le monde d'accord].
    En fait, dans ma vision, l'artiste ne sert pas un but ni un propos quand il crée une oeuvre d'art - et là, je sens déjà les mains se lever dans l'assemblé - Non, pour moi, l'artiste ne véhicule pas un message.
    La concience politique de l'homme a une sale tendance à faire ça... mais l'artiste, lui, se contente de faire ce qu'il a à faire.

    L'artisan lui, il a faim. Il veut manger, filler un toit à ses enfants et avoir une voiture pour draguer les filles. L'arisan lui, il crée avec un propos. Il crée des chaises dans le but que l'on puisse s'assoir dessus, ou de la musique pour de la publicité ou des jeux videos.

    Le problème, c'est qu'il arrive bien souvent que l'artisan soit artiste et réciproquement. Pour moi, l'imporance de faire la différence entre ces deux mots réside essentiellement dans l'idée que si on ne le fait pas, alors on autorise l'amalgame entre les deux, et donc, on s'autorise à traiter tous les artistes comme des artisans...

    Plus clairement, c'est arriver vers Van Gogh en lui disant : "Ecoute, ce que tu fais ça vend pas, alors pourquoi tu te mettrais pas à l'aquarelle, ou sinon, dans la plomberie, y a pas mal de débouchés".

    Alors oui, ta conférence etait probablement très intéressante pour tous les artisans en herbes qui rêvent de pouvoir vivre de leur passion - ce que j'entends généralement par là, c'est ; "qui revent de pouvoir glander et avoir de la thune" - parce que les artistes ont le droit de vivre de leur travail - et ma question, c'est "mais qui, bordel de cul, va se permettre de mettre un prix sur une oeuvre d'art ? hein ?...une oeuvre c'est un morceau d'âme matérialisée, alors, elle vaut combien mon âme ?"

    Oui, oui, je suis un intégriste... et puis, bon, voila, j'avais envie de gueuler, ça faisait longtemps que ça m'était pas arriver, mais y a un moment t'as envie de dire "ASSSSSEEEEZZZ" qd tu vois que les amalgames linguistique mène, in fine, à la disparition d'un concept, généralement, celui qui s'intègre le moins bien dans le modèle économique en place.
  • je répondrais pas à la place de Aysik, mais, malgré la modération dont il a fait preuve (et qui m'a surpris aussi, au fond nos posts se rejoignent, même si nos colères respectives ne passent pas les mêmes mots)
    Je suis pas trop un fervent défenseur du clivage artisan/artiste.. que tu ne défend pas vraiment d'ailleurs.. S'il y a confusion à mon sens ce n'est pas pour rien.. C'est peut-être justement que les clivages anciens se sont transformés. Comme le clivage professionnel/amateur dont j'ai trop longuement causé, ou travail/loisir ou sérieux/dilletante, ou rentable/généreux etc.
    en ce moment je privilégierai un clivage (qui vaut ce qu'il vaut, qui fonctionne pour moi en tous cas, pour mes petites pensées) création / art (au sens où l'effet d'une création, éventuellement une oeuvre, mais pas forcément, le processus de création ayant bien d'autres effets que la production d'un objet, hum, au sens où cet effet donc peut trouver sa place ou ne pas la trouver dans un monde de l'art (je dis un monde au sens où il y en a une foultitude))

    bon
    il n'en reste pas moins que l'idéologie dominante (la philosophie marketing que je l'appelle), tend à accroître la confusion, ou plutôt à simplifier les choses à l'extrême en promouvant un seul modèle d "artiste" (en réalité un producteur d'objets commercialisables) - pour des raisons mille fois répétées ici : entre autres qu'il faut bien faire vivre les intermédiaires, qui, inquiets de la (très) relative autonomie du consommateur, tendent à faire croire qu'ils sont indispensables (ce en quoi globalement vu le niveau de développement mental des dits consommateurs, ou de la majorité d'entre eux, on ne saurait leur donner tort).

    On a le monde qu'on mérite (enfin, j'ai de plus en plus envie de dire : qu'ils méritent : un rayon de soleil : vais faire pousser mes chêvres tiens..)
  • Bah en fait, pour moi le clivage est evident... ptet pour ça que je ne l'argumente jamais assez.
    Le clivage il git dans le fait que le mouvement du créateur est un mouvement essentiellement spirituel. Si ton esprit est focaliser sur la recherche du profit, à mon sens, tu crées un produit, puisque son propos est d'être vendu... donc de plaire.
    De mon point de vue, le mouvement de l'artiste est totalement différent, puisque son propos final n'a rien de commercial. Même s'il arrive que ce soit une pulsion de survit, il n'en est pas moins désintéressé et dénué de quelque considération que ce soit pour un public potentiel.

    Ton clivage est interessant....Je vais y réfléchir en allant faire pousser mon film d'animation ^_^
  • Moi je lance un BIG appel à toutes personnes de MONTPELLIER
  • En même temps je ne suis pas sûr qu'un marketeux ne veule que d''un "simple artisan". J'ai aussi et surtout l'impression que le statut d'artiste fascine, son image, son parcours, sa technicité... mais pas sa démarche, pas son discours parce que ce serai trop "clivant" et donc pas vendeur. Un marketeux se doit de s'adresser à sa cible sans pour autant décourager ses potentiels autres acheteurs. Enfin ça c'est une théorie, depuis l'élection de Sarkozy, je suis prêt à parier que l'on verra des campagnes qui se placeront dans un "moi je suis comme ça et je vous emm", ou "vive l'identité française, avec une femme, 2 gosses, et un chien"... enfin, on verra bien, je ne suis pas Elizabeth Tessier :roll: .

    En ce qui concerne mon post, je l'ai construit en reprenant le discours de la conférence puis en y mettant de plus en plus mon grain de sel, pour in fine donner mon avis. J'ai eu affaire à ce genre de personnages quelques fois, sans pour autant trouver la faille "en direct" devant eux (je suis parfois mauvais débatteur). Je prends volontairement du recul sur cette position parce je trouve que c'est comme cela qu'elle doit être traitée. On se fait trop souvent rattraper par de la récupération aux accents faussement libertaires. Le libre arbitre comme seul référence aux rapports humains et à leurs déterminismes, le libre arbitre comme conclusion aussi à tout débat, alors que les questions demeurent sans réponse.

    Et oui l'art ne sert à rien, et surtout pas à se considérer comme un artiste génial, un mec vachement productif, efficace ou je ne sais quoi encore. Là où les marketeux ne savent pas se placer c'est sur le domaine du politique, ils ne savent pas identifier les discours qu'ils amènent eux-même à diffuser, et s'ils s'en rendent compte, ne veulent pas l'avouer par faiblesse. On a là un point sur lequel s'appuyer mais sans écraser son interlocuteur. C'est toute la subtilité du message.

    Quand à la distinction entre artiste et artisan, elle est intéressante. elle me semble néanmoins dépassée par ce que j'ai dit plus haut, le marketeux veut un artiste, pas un artisan, plus pour l'image qu'il dégage que pour son travail. Le travail de l'artiste n'est qu'une illustration.

    Pour Endoctrasia, Big Apple, c'est à New York, pas à Montpellier... :roll:
  • yoh à tous,

    je suis désolé mais je ne comprends pas bien la problématique. je ne comprends pas comment on peut en arriver à opposer art et travail alimentaire. je ne comprends pas non plus comment on peut en arriver à considérer qu'une oeuvre de commande n'est pas artistique (les ménines seraient alors une croute !). ou que la multiplication des contraintes abaisse forcément le niveau artistique...

    par contre, je peux comprendre qu'on ne soit pas à la hauteur des contraintes à respecter et produire une oeuvre de merde au lieu de faire quelque chose qui transcende les contraintes. ou je peux comprendre qu'on ne soit bon qu'à une forme donnée de production artistique, et pourquoi pas même de manière totalement superficielle, et s'en contenter. Et si le hasard fait que cette forme-là est justement en vogue à notre époque et qu'il est aisé d'en faire commerce, je peux comprendre aussi qu'on puisse en vivre...

    C'est marrant que tu cites Herriman dans cet article de ton blog, voilà un de mes auteurs favoris, il a transcendé une forme "mineure" (strips pour quotidiens) en y apportant une poésie, une vérité, une sensibilité, une profondeur, ainsi qu'une constante remise en question des codes du langage narratif spécifique à la bande dessinée — autant de caractéristiques qui ne sont habituellement pas portées par ce "sous-genre" — tout en en respectant les règles strictes. De fait Herriman utilise la pauvreté du genre pour y exprimer tout son art (cf. par exemple la richesse de la relation triangulaire entre les 3 personnages principaux... "krazy kat" est vraiment tout sauf simple)... Ce n'est plus du petit strip comic de grands quotidiens (au sens de boulot alimentaire pour l'auteur et divertissement pour le lecteur) mais de la littérature (au sens du Quichotte qui se contient lui-même etc).

    A mon avis donc ce n'est pas l'industrie qui bouffe l'artiste mais c'est juste que l'industrie par essence n'a pas d'oreille. Et quand en plus elle pense que seule la vision à court terme est valable, ça n'arrange pas vraiment les choses. Pas étonnant qu'elle emploie tant d'artistes qui n'ont au fond rien à dire.
  • hi taro
    en fait
    à chaque fois qu'on essaie d'aborder ce thème sur le forum, et ça doit faire la mille deux cents quatre-vingt huitième fois à mon avis
    c'est le bordel
    un peu comme la question récurrente : "les licences libres sont-elles libres ou rendent -elles les hommes plus libres ?"
    là ce serait : "qu'est-ce que l'art ou l'artiste ?" etc.
    sous entendu : qu'est-ce qui n'en serait pas de l'art ?
    et re-sous-entendu : qu'est-ce qui mérite le titre d'art ?
    alors évidemment, ce genre de mots : liberté, art, création, etc. ne sont pas aussi avantageux que par exemple le mot "chaise"
    le mote chaise, globalement on peut s'attendre à tomber d'accord sur ce qu'il est censé signifier. À part dans les cas extrême (par exemple, certains psychotiques délirants), on peut s'attendre à ce que l'autre comprenne suffisamment ce qu'on veut dire en disant : " asseyez vous donc sur cette chaise". La définition du mot chaise ne pose pas de problèmes métaphysiques trop exigeants, et il y a un certain consensus là dessus (quoique.. n'allons pas trop vite : si je dis "prends cette chaise !" sur un ton marqué d'impatience et de haine, ce n'est pas la même chose que de dire doucement et avec amour : "prends cette chaise".. Et on peut toujours imaginer selon le contexte, que le type, au lieu de s'asseoir, se barre avec la chaise sous le bras par exemple, comme dans la fameuse blague de potache, "prenez la porte !", et le gamin de démonter la dite porte avec application. C'est ce que Freud appelle le mot d'esprit, auquel il a consacré un gros volume excellent. )
    bon :
    le mot "art" par exemple, fait partie de ces mots qui charrient avec eux une muttiutde de représentations, de théories, de phantasmes, d'expériences vécues directement ou indirectement.
    Par exemple, je causais avec une ex-jeune artiste contemporaine ayant eu du succès autrefois avant de sombrer volontairement dans l'oubli : elle me racontait une fête orgiaque avec toutes les huiles de l'art contemporain, un débauche sexuelle et toxicomaniaque, hé bien pour elle l'art c'est ça : un milieu de débauche où des journalistes sodomisent des artistes dans des boîtes de nuit glauques sous le chapeautage de Canal + et du ministère de la Kulture.
    maintenant elle dit qu'elle fait de la peinture (de la création, sous entendu : sans perspective artistique), et évite soigneusement "l'art".
    cette représentation liée au mot "art" lui appartient, on ne la trouvera pas dans le Petit Robert, mais elle est tout à fait en droit de défendre cette idée là, puisque c'est son expérience de la chose.
    Il serait stupide de lui reprocher de confondre "un certain milieu de l'art" avec "l'art en général". Parce que celui qui lui ferait ce repràoche serait bien incapable de fournir une définition correcte, c'est-à-dire consensuelle, du mot "art".
    Je prends toujours l'exemple des "artistes" dits bruts ou outsider, qu'on déisgne ainsi depuis Dubuffet parce qu'ils n'ont aucune connaissance du milieu de l'art, ils ne savent pas qu'ils font de l'art. Les oeuvres deviennent des oeuvres d' "art" dans le regard savant de l'autre, du collectionneur par exemple, du psychiatre amateur d'art, etc. Mais le sont-elles par essence ? par nature ? On voit bien que ça ne va pas loin cette question là.

    dans mon idée, ces mots là, "art", "libre", "création", peuvent être conçus comme des mots-phantasmes, des idéaux, pour le dire plus simplement, ils véhiculent des VALEURS. et la magie de ces mots, c'est que, au même titre que le mot démocratie par exemple, ils sont d'emblée "performatifs" comme dirait le philosophe Austin (que je vous conseille au passage) : ils changent le monde pour dire vite, ils suscitent des luttes, des guerres même, des souffrances et des joies qu'un mot comme chaise ne suscitera sans doute jamais. (quoque : on se bat parfois à mort pour accéder à certains fauteuils, prendre la place d'un autre sur la chaise)

    Bref.
    nos discussions aboutiront toujours et forcément à des malentendus. Et c'est heureux je pense. Parce que ce serait vraiemnt terrible que ces mots là fussent une fois pour toute cadenassés dans une définition princeps.

    J'ai un regret toutefois.. je trouve dommage que la plupart du temps, nous parlions de l'art ou de la création ou bien "en général" - ce qui peut au mieux faire un début de philosophie, ou bien " en se référant à deux trois exemples ou contre-exemples tirés de ce que nous croyons connaître de l'art".
    Quand on fait cela, on se condamne nécessairement à normativer les choses. Séparer le bon grain de l'ivraie. Les bons et les mauvais objets. Je prends le reproche pour moi-même dans un sens. Quand je me mets en colère en disant que la plupart des "artistes" ou des "créateurs" d'aujourd'hui n'ont rien à dire (et de les inviter à faire plutôt du jogging, c'est très in en ce moment, ou de la couture, au moins c'est utile), je fais de la provoc bien sûr, mais je ferais mieux de parler de ma propre expérience créative. De la raconter d'essayer de la décrire.

    C'est ce qui nous manque cruellement : par une sorte de pudeur ou d'angoisse ou d'incapacité à parler de soi ou de défaut de connaissance de soi, on évite soigneusement de parler de la seule chose qui à mon avis, approcherait d'un discours honnête et fécond : sa propre expérience, ses propres phantasmes, son propre désir, ses difficultés, ses doutes, ses angoisses, ses pages blanches etc.
    Tout se passe comme si on évitait soigneusement de se positionner en tant que sujet : c'est très contemporain ça, et très français. Le français fonce vers la théorie grandiloquente, et forcément il rate la singularité, la pluralité, le réel. Il n'est pas assez pragmatique à mon avis, pas assez attentif à ceci que chacun d'entre nous sommes porteurs d'une expérience unique. S'il y avait une vérité du discours sur l'art, elle serait la somme de toutes ces expériences uniques, comment chacun de nous investit et incarne cette part de l'expérience humaine. Évidemment, un tel discours ne serait jamais achevé. Et d'une certaine manière il se poursuit depuis, sinon la nuit du temps, du moins depuis le Phèdre de Platon et la poiétique d'Aristote :)

    Voilà
    c'était pour ce matin, mon introduction, une sorte de préalable à toute discussion sur l'art, la création, la liberté, la démocratie.

    Pour finir je reciterai la phrase de taro :
    je suis désolé mais je ne comprends pas bien la problématique.

    forcément
    vu qu'on ne sait absolument pas sur quoi porte cette problématique. (ou plutôt chacun de nous croit le savoir, ce qui revient au même)
  • Je pense taro que tu tombes dans le piège du marketing que j'ai évoqué plus haut. Considérer l'artiste comme une personne peu influencée, retirée du monde, avec un caractère et une volonté inébranlable, et s'il ne l'est pas, il serait automatiquement "mauvais". On est là dans un débat de fond je pense, l'individu, le système et comment s'imbriquent les deux, comment l'individu se place dans des contraintes qui peuvent aller à son encontre et comment il les gère. Comment il en fait partie, comment il participe à sa construction (la sienne et le système dans lequel il s'inscrit).
    Et d'ailleurs quand on parle de système, on parle de quoi ? Je dirai que ma conception serait d'un rassemblement de contraintes érigées en vérités, en évidences qui enclave toute individualité.

    C'est peut-être cela au fond la problématique des rapports l'art et de l'industrie.

    Maintenant sur ce qui fait "art", ce qui fait "artiste"... Je dirai que ça ne dépend pas de nous et que nous essayons de nous accaparer quelque chose dont le jugement in fine ne nous appartient pas.
    Petite expérience personnelle :
    Quand j'étais ado, on me disait un peu avec dédain que ce que je faisais à l'époque était de l'expression, mais n'était pas de "l'art". J'étais très imbriqué dans mon moi et mes propres questions existentielles et je les exprimais par la peinture, la musique, les poèmes, l'écriture... Une sorte de volonté de faire sortir tout cela, de le montrer (pas trop car je ne pouvais pas supporter de donner mes "créations"). Et puis un concours, un prix des réactions, puis d'autres réactions, de nombreux points de vues se sont exprimés pour me dire que j'étais soit "un peu artiste au fond", soit "que me démarche était artistique". Bref beaucoup d'indices révélateurs que mon travail de création passait par la case "art".
    Aujourd'hui je me définis comme un artiste, en me basant notamment sur ce vécu, ces retours d'une période que s'éloigne parfois un peu de ce que je deviens. Peut-être que je dévie de "l'artiste" ? Mais ce n'est pas à moi de le dire, c'est aux autres.

    Il est je pense nécessaire de s'enlever de l'esprit que l'on "est" artiste parce que l'on se considère ainsi, mais c'est avec la confrontation des autres et de leur jugement (parfois difficile à supporter) qu'on le devient.

    Qu'est-ce qui fait "art" ?
    Peut-être que c'est tout ce qui fait que l'on se dit que la démarche est intéressante, novatrice parfois, bien exécutée dans d'autres cas. Bref qu'on y trouve un intérêt collectif, pas seulement un intérêt personnel.

    Un texte tout à fait intéressant que j'ai trouvé récemment qui pourrait répondre à Lacrymosa sur la différence entre artisan et artiste :
    http://denis-collin.viabloga.com/news/culture-et-travail
  • Maintenant sur ce qui fait "art", ce qui fait "artiste"... Je dirai que ça ne dépend pas de nous et que nous essayons de nous accaparer quelque chose dont le jugement in fine ne nous appartient pas.

    c'est là où ne sommes pas d'accord aysik :)
    (je rééxplique pas y'a mon message ultra long au dessus : mais pour résumer : personne, je dis bien personne n'a autorité pour déclarer aujourd'hui ce qui est de l'art ou pas. Duchamp a réussi son coup en fait.. et d'une certaine manière, tant mieux)
  • mea culpa, j'ai mis du temps à rédiger mon texte, et je suis parti manger par la suite.

    Je pense justement qu'il ne faut pas s'arroger personnellement le seul sens du mot "art", car c'est une entrée de l'individu dans ce que j'appellerai volontiers l'espace commun. Quand je parle de "cultures par tous", c'est la même chose, l'art n'appartient à personne mais à tout le monde et personne ne doit s'arroger le droit de s'appeler "artiste".

    Je pense que le résultat de nos pensées est semblable, le chemin lui est tout autre, d'ailleurs, je voudrais bien savoir qu'est-ce qui te fait aller dans ce sens ?
    Dans ton exemple, je ne vois en l'art qu'un prétexte bourgeois (?) pour faire des orgies en mieux les acceptant.

    Tiens d'ailleurs ça me fait penser à ce très cher Jean Louis Costes ("artiste" qui aime bien se rouler dans sa merde pour en asperger ses spectateurs) qui s'en va faire des conférences avec Alain Soral en ce moment....
    http://marseille.indymedia.org/news/2007/05/9815.php
  • mai 2007 modifié
    pffff Costes pfffff

    oui on en arrive à la même chose : ça nous insupporte qu'une institution ou un quidam s'approprie le mot art, ou liberté ou démocratie
    mais
    moi je suis relativiste
    (si si)
    la conception de l'art de Marcel, mon voisin de pailer, vaut la mienne et celle du ministre de la Culture.
    et ça je m'en félicite, parce que je crois que c'est la fonction de ce mot de porter nos aspirations, de dire quelque chose de très intime au fond, de nos désirs etc.
    mais
    au nom de cette polysémie je lutte tant que je peux contre les zigomars marketing (mes ennemis jurés) qui use de leur pouvoir pour s'approprier le langage et notamment ces mots là (je leur laisse des mots comme cheese burger par exemple, ça me gène pas trop, ou "starac")
    donc je sais pas si tu es d'accord pour distinguer là la polysémie (souhaitable, et le marketing man a tout à fait son mot à dire de ce point de vue) et le POUVOIR, l'exercice du pouvoir en vue d'appauvrir la polysémie.

    Tiens une anecdote qui m'avait scandalisé
    notre nouvelle ministre de l'identité nationale (oops correction : elle est en fait ministre de la justice). En débat avec besancenot on tv (j'étais pas chez moi, j'ai zappé deux minutes, c'est tout ce que j'ai vue des élections en fait)
    besancenot lui sort l'histoire des rafles de sans papier à paris dernièrement. Là, la ministre entre dans une colère noire et dit :
    "vous n'avez pas le droit d'employer ce mot là !"
    le mot rafle
    au prétexte j'imagine, que, les rafles, ça a eu lieu sous Vichy et que ce mot ne devrait être employé que pour désigner cet événement là (la rafle du vel d'hiv j'imagine). Du coup voilà, il n'y a plus de rafles.
    C'est très grave ce genre de déclaration, ça clive non seulement l'histoire (il y a eu els méchants, mais ça c'est le passé, la France c'est super cool, on est des gentils tout plein, ne nous repentons pas)
    mais ça clive aussi le langage. ça l'appauvrit, ça le dégoupille,
    c'est hyper grave
    ben TF1 aimerait faire la même chose avec le mot artiste par exemple
    voilà où j'entre en résistance (en écrivant par exemple) et tu fais de même sur ton blog en fait, et quand nous causons ici :
    on ne tient pas les mots pour définitivement établis
    donc on peut causer
  • dana écrit:
    pffff Costes pfffff

    oui on en arrive à la même chose : ça nous insupporte qu'une institution ou un quidam s'approprie le mot art, ou liberté ou démocratie
    mais
    moi je suis relativiste
    (si si)
    la conception de l'art de Marcel, mon voisin de pailer, vaut la mienne et celle du ministre de la Culture.
    et ça je m'en félicite, parce que je crois que c'est la fonction de ce mot de porter nos aspirations, de dire quelque chose de très intime au fond, de nos désirs etc.
    mais
    au nom de cette polysémie je lutte tant que je peux contre les zigomars marketing (mes ennemis jurés) qui use de leur pouvoir pour s'approprier le langage et notamment ces mots là (je leur laisse des mots comme cheese burger par exemple, ça me gène pas trop, ou "starac")
    donc je sais pas si tu es d'accord pour distinguer là la polysémie (souhaitable, et le marketing man a tout à fait son mot à dire de ce point de vue) et le POUVOIR, l'exercice du pouvoir en vue d'appauvrir la polysémie.

    Tiens une anecdote qui m'avait scandalisé
    notre nouvelle ministre de l'identité nationale. En débat avec besancenot on tv (j'étais pas chez moi, j'ai zappé deux minutes, c'est tout ce que j'ai vue des élections en fait)
    besancenot lui sort l'histoire des rafles de sans papier à paris dernièrement. Là, la ministre entre dans une colère noire et dit :
    "vous n'avez pas le droit d'employer ce mot là !"
    le mot rafle
    au prétexte j'imagine, que, les rafles, ça a eu lieu sous Vichy et que ce mot ne devrait être employé que pour désigner cet événement là (la rafle du vel d'hiv j'imagine). Du coup voilà, il n'y a plus de rafles.
    C'est très grave ce genre de déclaration, ça clive non seulement l'histoire (il y a eu els méchants, mais ça c'est le passé, la France c'est super cool, on est des gentils tout plein, ne nous repentons pas)
    mais ça clive aussi le langage. ça l'appauvrit, ça le dégoupille,
    c'est hyper grave
    ben TF1 aimerait faire la même chose avec le mot artiste par exemple
    voilà où j'entre en résistance (en écrivant par exemple) et tu fais de même sur ton blog en fait, et quand nous causons ici :
    on ne tient pas les mots pour définitivement établis
    donc on peut causer

    En ce qui concerne le mot "art", je suis d'accord avec toi sur la polysémie, et le combat que je mène est le même (sus aux marketeux !). Ces gens ne sont que des vendeurs qui imaginent des stratégies de ventes, ils sont tout au plus créatifs, imaginatifs, mais certainement pas des "artistes". Néanmoins, je vais plus loin en disant que personne ne peut se dire personnellement "artiste". Tout comme on ne peut s'approprier "l'art". Je pense que c'est le sens que je donne aux mots qui veut cela.

    "L'art" serait quelque chose de supérieur à une définition fixe, quelque chose qui donne énormément, mais qui parce qu'il est "art" ne doit pas être récupéré sous peine de perdre sa nature. L'art ne doit pas être pensé de manière individuelle, parce qui fera "art" pour moi ne le sera pas forcément pour mon voisin, je n'ai pas le "droit" de lui imposer cette vision là en proclamant que c'est de l'art. Par contre si une autre personne devient d'accord et si un consensus sur cette oeuvre nous permet de dire in fine que effectivement cette oeuvre se rapproche de "l'art"... Mais la discussion est toujours ouverte parce qu'on part du postulat que "l'art" n'est pas un statut.

    Je dirai que je lui donnerai la même signification que le mot de "démocratie". Un pays n'est pas démocrate, il le devient. Ce n'est pas un statut fixe que l'on peut importer/exporter à sa guise. Et tout comme la notion "d'art", il est nécessaire de ne pas s'accaparer ce mot.

    Et oui, j'ai vu ce débat de sourd entre R.Dati et O.Besancenot. La cécité de Dati qui voulait faire son "coup" médiatique en donnant des leçons d'histoire à Besancenot (licencié d'histoire !) était inique. Tel un soldat sarkozyste, elle attaquait, mais n'écoutait aucun argument, ni ne répondait aux questionnements (nécessaires). Parce qu'on aura beau dire tout ce que l'on voudra sur Besancenot (coco=diable=utopiste=irréaliste...), il sait souvent poser des questions à mon sens existentielles qui devraient guider toute action politique et toute réflexion de gauche. Doit-on privilégier le capital sur le travail, sur la vie humaine ? Et malheureusement pour certains à gauche, l'opposition capital/travail serait caduque. La rente, la propriété, l'héritage seraient magiquement liés au travail et celui-ci automatiquement lié au bonheur des gens...

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